La série WILL Épisode 8 — Positions de perception (1:2)
Adèle est persuadée d’avoir « raison »… jusqu’à ce que Will lui propose de changer de point de vue. En explorant les positions de perception (moi, l’autre, l’observateur), elle retrouve des options de dialogue et de diagnostic.
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Transcript
Will face caméra : Grâce à une meilleure organisation, et malgré son projet supplémentaire, Adèle réussit à passer beaucoup plus de temps avec l’équipe interne, une des activités qui lui plaisait le plus dans son métier. Mais cela fait naître de nouveaux problèmes…
Je suis Will, créateur de la méthode éponyme qui réconcilie humain et performance au travail.
Will : Tu me disais que t’as du mal à communiquer avec Stéphane, le designer de l’équipe interne ?
Adèle : Ah ouais… La communication avec Stéphane… C’est compliqué !
Will : C’est compliqué ?
Adèle : On s’est pris la tête sur la couleur d’un bouton que le client voulait changer dans l’application… Stéphane, lui, il voulait pas… Ça a dégénéré, il m’a dit que je défendais pas l’équipe, que je savais pas dire non…
Will : ok (en mode “quand même !”)
Adèle : Et maintenant, il me fait la gueule, il ne veut plus répondre à mes messages, il est limite agressif. Et en fait, ça me pèse de fou…
Will : et du coup qu’est-ce que t’as fait ?
Adèle : Bah au final, j’en ai parlé à Jeff pour qu’il intervienne parce que je savais plus quoi faire… et que t’étais pas là (elle rit)… Ça a amélioré la situation pendant quelques jours, mais ensuite ça a recommencé…
Will (face caméra) : C’est un exemple typique de conflit, qui illustre bien le triangle de Karpman. Adèle est dans une position de victime, ce qui incite Stéphane à prendre une posture de persécuteur. Jeff, le manager, joue le rôle du sauveur, ne faisant que renforcer la posture victimaire d’Adèle. Pour sortir de cette spirale négative, il faut qu’Adèle devienne “créatrice”, en passant à l’action, ce qui poussera Stéphane à se muer en challenger. Et pour l’aider, elle a un besoin d’un coach plus que d’un sauveur. C’est moi qui vais jouer ce rôle, et c’est ce rôle que vous pourrez aussi jouer en tant que manager avec vos collaborateurs.
Will : Je te propose qu’on fasse un jeu de rôle, les positions de perception. Ça va t’aider à mieux formuler ton message la prochaine fois que tu discuteras avec Stéphane, ça te dit ?
Adèle : Pourquoi pas, de toute façon au point où j’en suis, ça peut pas être pire…
Texte : en bas à droite : Position 1 : émetteur — Formuler son message à la personne
*Will (il installe une chaise en face d’Adèle qui le regarde interloquée) : T’inquiète pas, je vais t’expliquer… (pour la rassurer). J’aimerais que tu fasses comme si Stéphane était là, en face de toi (il montre la chaise vide*). Vas‑y, dis‑lui ce que t’aimerais lui dire.
Adèle : C’est bizarre ton truc… Mais bon, ok… laisse moi réfléchir… Qu’est‑ce que je lui dirais… “Bonjour Stéphane... Voilà... Je tenais à te dire que j’aimerais que tu répondes à mes messages… Ça fait plusieurs fois que je t’envoie un message, assez long, ça me prend du temps, j’essaie de t’expliquer ce qui va pas et toi, tu ne veux pas me répondre. Je trouve ça irrespectueux... En plus, cette ambiance pourrie, ça me mine…”
Will : Ok merci ! Maintenant, j’aimerais que tu t’assoies dans la chaise vide et que tu fasses comme si tu étais Stéphane, comment tu te sens après avoir entendu Adèle ?
Texte : en bas à droite : Position 2 : Récepteur — Exprimer comment la personne a reçu le message
Adèle : C’est carrément du théâtre ton truc… Bon, je vais essayer… Comment il réagirait… Je pense qu’il se sent... énervé.
Will : Ok, est‑ce que tu peux dire “je”, comme si t’étais vraiment Stéphane ?
Adèle : OK… Je (elle insiste sur le je) me sens énervé… car je trouve ça injuste. Quand j’entends Adèle, on a l’impression que je suis le seul responsable ! Sauf que quand on a un problème de communication, chacun a sa part de responsabilité.
Will : D’autres sentiments après avoir écouté Adèle ?
Adèle : Franchement, je sais pas trop…
Will : Quand elle dit qu’elle aimerait que tu répondes à ses messages, qu’est‑ce que tu ressens ?
Astuce : Reformuler ce qui a été dit dans la position précédente
Adèle : (du tac au tac) De l’agacement.
Will : De l’agacement ?
Adèle : Oui. (son para‑verbal change, elle devient Stéphane) Je ne suis pas un enfant à qui on donne des ordres... Ça m’agace de recevoir des ordres.
Will : Et quand Adèle dit que ça la mine ?
Adèle : Ça, je m’en rendais pas compte, pour moi elle était juste saoulée…
Will : Si je t’ai bien écouté (mini blanc et sourire) Stéphane, tu ressens donc de l’injustice, de l’agacement et de la compassion. C’est ça ?
Adèle : Exactement.
Will (face caméra) : La position 2 force littéralement la personne à se mettre à la place de l’autre. C’est la définition même de l’empathie. Même si les sentiments exprimés par Adèle jouant Stéphane ne sont pas exactement ce qu’il ressentirait, ça ne peut que l’aider à améliorer son message. Nous allons maintenant passer à la troisième et dernière position, celle du consultant.
Texte : en bas à droite : Position 3 : Consultant — Se donner des conseils pour améliorer son message
Will : Je te propose maintenant de faire la dernière position, celle du consultant. Tu vas donner des conseils à Adèle pour qu’elle améliore son message. Tu peux te lever et te mettre au milieu des deux chaises.
Adèle : OK… Je pense que je dois peut‑être prendre plus ma part ?
Will (montrant la position 1) : Tu veux dire que tu conseilles à Adèle de prendre davantage sa part ?
Adèle : Oui pardon...
Will : Qu’est‑ce que tu veux dire par prendre sa part ?
Adèle : T’as aussi des torts comme le dit Stéphane à juste titre, et tu pourrais les reconnaître.
Will : Très bien. Quel autre conseil tu pourrais donner à Adèle ? Par exemple quand Stéphane dit ressentir de l’agacement parce que c’est pas un enfant et qu’il a pas à recevoir d’ordres ?
Adèle : Peut‑être de... formuler de manière différente ce que t’attends de Stéphane. Au lieu de dire “j’aimerais que tu me répondes”, plus quelque chose comme : “Est‑ce que tu serais ok pour me répondre ?”
Will : Top. Et quand Stéphane dit qu’il se rendait pas compte que ça rendait Adèle aussi triste, qu’est‑ce que t’as envie de lui suggérer (il montre la chaise Adèle) ?
Adèle : Peut‑être que ça pourrait être intéressant Adèle que tu lui parles plus de ce que tu ressens toi. De tes sentiments à toi plutôt que les siens.
Will : Ok. Donc si je récapitule : tu conseilles à Adèle de prendre sa part, de reformuler sa demande et de parler plus de ses sentiments. Est‑ce que c’est ça ?
Adèle : Oui c’est ça.
Will (face caméra) : Nous venons d’effectuer un tour complet dans les trois positions. Dans le prochain épisode, nous effectuerons un nouveau tour pour voir comment Adèle va modifier son message et l’impact que ça aura sur Stéphane.
Outro : Les conflits sont fréquents dans le monde professionnel. La plupart du temps, ils trouvent leur origine dans le fait que nous interprétons différemment une même réalité. Et souvent, plutôt que d’essayer de comprendre l’interprétation de l’autre, nous essayons de le convaincre que la nôtre est meilleure.
Si vous êtes manager, quand un conflit s’installe entre deux de vos collaborateurs, l’un d’eux peut faire appel à vous en tant que sauveur pour résoudre le différend. Cette situation est souvent vouée à l’échec car elle l’enfonce dans un rôle de victime.
L’exercice des positions de perception vous offre un outil puissant pour sortir de ce rôle de sauveur et aider votre collaborateur à résoudre par lui‑même son conflit en le mettant à la place de l’autre. Il pourra alors prendre conscience de toutes les limites de sa communication actuelle.